Sous un ciel apparemment clair, lorsque le 29 novembre 2023, le Ministre de la Santé Publique, Malachie MANAOUDA, porte à la connaissance de ses concitoyens, une information majeure, à savoir, l’annonce de l’arrivée imminente du vaccin contre le paludisme. L’information, depuis lors, fait grand bruit. Et pour cause…
À la vérité, si on se souvient bien de l’épisode 2020 à 2022 dans le monde, qui peut avoir oublié les 13 mesures du Gouvernement de la République, édictées par le Premier Ministre, Chief Dr Joseph DION NGUTE, visant à barrer la voie à l’alors très faucheuse, maladie du Sarcov 2, plus connu sous l’autre acronyme COVID-19 ?
UN CONTEXTE DE CRISE DE CONFIANCE GÉNÉRALISÉE
La crise de confiance entre les pouvoirs publics et les populations du Cameroun, est patente. ENEO ne fournit pas ou presque de l’énergie électrique, CAMWATER ne parvient pas à alimenter en eau potable le pays dont la population croît sans cesse. Toutes choses qui amoindrissent la confiance des populations vis-à-vis du Gouvernement.
LES ORIGINES “COVIDIENNES” DE LA MÉFIANCE DES CAMEROUNAIS VIS-À-VIS DU VACCIN GAVI
Qu’on veuille bien nous passer ce néologisme. Il s’agit de l’adjectif “COVIDIENNES“. Il dérive de COVID et fait référence à la pandémie qui a secoué le monde, et donc aussi, le Cameroun, en 2020, même si depuis quelques temps, on constate une sorte d’accalmie.
COMPRENDRE LE COMMUNIQUÉ RADIO- PRESSE DU MINSANTE
Si nous faisons ce détour historique, c’est pour établir le lien entre les deux “peurs” qui secouent encore le pays aujourd’hui. Cependant, bien que la première , le COVID-19 s’est quelque peu atténué, la deuxième, le paludisme, est de loin, plus meurtrière. Pourtant, les citoyens rechignent à se faire vacciner aujourd’hui, comme lors de la crise du Sarcov 2.
En parcourant le texte du MINSANTE, on apprend que “le Cameroun a réceptionné le 21 novembre 2023, 331 200 doses de vaccin contre le paludisme, comme outil additionnel de contrôle de cette maladie.”
La “bonne nouvelle ” du Ministre n’épouse pas l’assentiment des populations, qui préfèrent s’en tenir à ce que nous pourrions appeler “outil primordial de contrôle de cette maladie “; en réponse à “outil additionnel de contrôle de cette maladie” comme le dit le texte ministériel.
À la vérité, les Camerounais ne se sentent pas à l’idée de se faire inoculer une de ces 331 200 doses vantées par MANAOUDA et contestées par ses concitoyens, qui leur préfèrent les bonnes “vielles recettes de grand-mère”, en référence à toute la pharmacopée traditionnelle africaine contre cette pathologie causée par le plasmodium et causée l’anophèle femelle. De plus, les spécialistes de la médicine nous renseignent qu’un vaccin doit subir des tests, avant d’être déclaré bon pour la santé des hommes. Ce que semble approuver le ministre, qui s’appuie sur une démarche datant de deux ans. Selon lui toutes les étapes ont été respectées, tant en interne, qu’en externe, “tel qu’instruit depuis le mois de novembre 2021, le processus d’introduction de ce vaccin, validé par l‘OMS, a suivi toutes les étapes essentielles requises, notamment l’approbation du Groupe Technique Consultatif National de la Vaccination (GTCNV) en mai 2022 et du Comité de Coordination Inter-Agences (CCIA) en juin 2022. La validation dudit vaccin par nos deux Comités scientifiques nationaux en matière de vaccination, a permis au Programme Élargi de Vaccination (PEV) et au Programme National de Lutte contre le Paludisme (PNLP), de procéder à la stratification du risque de décès du paludisme et de sélectionner les Districts de Santé prioritaires, donc à forte transmission du paludisme en février 2023.
En effet, le vaccin RTS, de nom Commercial Mosquirix (R), est un vaccin à base de protéine recombinante comme le vaccin contre l’hépatite virale B. Il a été mis au point au cours de plusieurs décennies de recherche en laboratoire par des chercheurs africains, au rang desquels notre compatriote le Professeur Rose LEKE. La phase de recherche clinique est passée par cinq essais cliniques randomisés dans sept pays africains impliquant 15 459 enfants suivis pendant 05 ans. La phase de démonstration a été menée au Kenya, au Ghana et au Malawi avec 1,7 millions d’enfants vaccinés.
Selon les résultats de l’efficacité obtenus, l’introduction de ce vaccin dans un cadre global de lutte contre le paludisme qui met en synergie plusieurs interventions (Moustiquaires imprégnées, Traitement Préventif Intermittent, et la vaccination), permettant de couvrir toute l’enfance et d’éviter chaque année, en fonction du taux de couverture, près de 2000 décès chez les enfants de moins de 05 ans.
Le ministre de la Santé Publique précise que les effets indésirables les plus courants de ce vaccin sont notamment : la fièvre (27% des cas) et l’irritabilité (14%); la douleur au site d’injection (16%); le gonflement au site d’injection (07%). Ces effets secondaires sont tous résorbables dans les 72 heures suivant la vaccination. La convulsion fébrile dans les 07 jours suivant la vaccination, rapportée sur 0,1% d’enfants vaccinés, est l’événement indésirable le plus sérieux.”
On a tout juste envie de s’écrier “hourra Monsieur le Ministre “!!! On a tout juste envie de demander aux parents réticents, comment donc pouvez-vous vous inquiéter pour la santé de vos enfants, alors même que le gouvernement s’en soucie plus que vous ne pouvez l’imaginer ? Pourquoi donc n’avez-vous pas confiance en ce gouvernement qui pourtant, n’a pour seul souci que de s’occuper de votre bien-être, et de celui de vos progénitures ? Ne voyez-vous donc pas que le bien-être de nos concitoyens préoccupe au plus haut point le gouvernement, qui par souci de maîtrise de la dépense publique, a même déboursé uniquement 155, 4 millions de FCFA tandis l’alliance GAVI a payé 3, 6 milliards pour de vaccin ? Bien plus, ne constatez-vous que le gouvernement va même jusqu’à préciser qu’un “2ème vaccin mis au point au Burkina Faso, et qui affiche une efficacité de 67%, après trois (03) années de suivi vient d’être approuvé par l’OMS et le Cameroun saisira toute opportunité de glisser à tout moment, vers un un vaccin plus adéquat dès que le stock sera accessible, en vue de continuer à protéger nos enfants.?”
Cette autre attitude du MINSANTE nous inspire deux réflexions. D’abord, il est à noter que le pays n’est pas véritablement rassuré par ce vaccin dont il est question au début de ces analyses. La possibilité de “glissement “, on s’habitue bien déjà à ce concept depuis que la CAN Total Énergies Cameroun 2021 a “glissé” pour ne se jouer qu’en 2023. Lorsque le MINSANTE propose un autre “glissement”, ceci a le mérite de ne pas rassurer du tout les Camerounais. Et cela nous rappelle fort tristement, l’épisode de la COVID-19.
En tout état de cause, il faut avoir l’honnêteté et le courage d’affirmer que le climat de suspicion généralisé teinté de méfiance des Camerounais, vis-à-vis du gouvernement, quant à ce qui est des besoins qui, selon le mot de Johan GALTUNG, “fondent la dignité de l’être humain”, est le terreau fertile qui semble conduire même à la défiance des gouvernés face aux gouvernants. Il faut dire que pour le spécialiste en “peace studies“, la nutrition, la santé et l’éducation sont les trois besoins qui font la dignité de l’être humain. Donc lorsque le discours du gouvernement semble rencontrer l’antipathie des populations, il y a lieu de constater la rupture du contrat social au Cameroun. Quoi qu’il en soit, le gouvernement exhorte ses concitoyens à rester soudés derrière la vision du Chef de l’État, tandis que ceux à qui il s’adresse rament à contre courant de cette philosophie. Pour notre part, il est question de susciter la réflexion afin que chacun se fasse sa propre opinion. Loin de nous donc la prétention d’indiquer un quelconque chemin à suivre. À chacun son option!
Martin MINKO